Il était une
fois trois petits gorets : le grand petit goret, le moyen petit goret, et
le petit petit goret.
Un jour, leur
maman cochonne leur dit : « Mes chers fistons, vous êtes bien
gentils, mais j’en ai assez de vous voir passer des heures devant la télé à
faire du lard. Il est temps pour vous de quitter votre home sweet home afin de
construire votre home sweet home.»
Les trois
petits gorets, pris au dépourvu, firent donc leur baluchon pour voler de leurs
propres ailes, ce qui à la base n’est pas chose facile pour un cochon non zélé.
Le grand
petit goret, qui était le plus feignant des trois, vit des bottes de paille
dans un champ et décida de s’en servir pour construire sa case. L’affaire
allait ainsi être rondement menée et il pourrait continuer à regarder les
matchs de foot en buvant de la bière et en mangeant des sandwiches.
Le moyen
petit goret, un peu plus courageux, poursuivit son chemin jusqu’à la forêt où,
en empilant quelques troncs d’arbres de façon judicieuse, il se fabriqua une
merveilleuse hutte écolo et design façon Starck.
Le petit
petit goret, le plus malin des trois, jeta son dévolu sur une villa secondaire
inoccupée avenue Foch, avec piscine et jacuzzi, cuisinière, chauffeur et jardinier
à disposition.
Mais le grand
méchant loup, qui avait observé leur manège grâce à ses jumelles infrarouges,
vit là l’opportunité de remplir son garde-manger à moindre coût.
Il se
précipita chez le grand petit goret, avachi devant sa télé, souffla, souffla,
même pas très fort, et la case s’envola. Et le grand petit goret enfourcha son
vélo pour se réfugier dans la hutte de son benjamin.
Le loup,
assez fier de ses capacités pulmonaires, en profita pour prendre quelques
photos de la case en ruine afin de les poster sur Facebook, et se rendit
tranquillement chez le moyen petit goret.
Là, même
scénario, au grand dam des pauvres petits gorets tremblant de peur. Le loup
souffla, souffla, et la hutte s’envola rapidement car le design, c’est chouette,
mais pas solide. Le moyen petit goret bondit sur le dos du grand petit goret,
lui balança quelques coups de fouet pour le faire avancer plus vite, au grand
plaisir du grand petit SM goret.
Ils
s’enfuirent ainsi chez le petit petit goret qui faisait le malin en se
prélassant dans son jacuzzi avec deux belles cochonnettes qui lui récitaient du
Baudelaire, car on a beau être cochonnes, on n’en est pas plus stupides pour
autant.
Les deux
petits gorets délogèrent les deux cochonnettes, au grand soulagement de leur
petit frère qui commençait à saturer un peu avec Baudelaire. Les deux frères lui
racontèrent des blagues de Toto, car, y a rien à faire, rien de mieux que de
bonnes blagues de Toto pour se détendre dans un jacuzzi après avoir écouté du
Baudelaire pendant trois heures. Et les trois petits gorets rirent tellement qu’ils
faillirent se noyer tous les trois, ce qui eut été fort dommage pour la suite
de l’histoire.
A cet instant
le loup sonna à leur porte, déguisé en Giscard d’Estaing, car ce loup était
plus malin que ses semblables et se doutait bien que s’il soufflait sur une
maison Avenue Foch, ça ferait louche. Le petit petit goret, enfila vite son
peignoir de bain et alla ouvrir.
Quelle ne fut
pas sa surprise de se retrouver face à cet éminent homme d’état.
« Bonchour,
dit le loup, contrefaisant à merveille sa voix pour imiter celle de Giscard. Comme
vous le chavez, ch’ai l’habitude de venir décheuner dans un foyer franchais le
premier dimanche du mois, et ch’est chur vous que ch’est tombé. Vous avez
drôlement de la chanche ! »
Rappelons-le,
le petit petit goret n’était pas né de la dernière pluie, mais il avait oublié
que Giscard n’était plus Président depuis 1981.
Il appela
donc ses frères afin qu’ils aillent vite chercher des croissants et préparent le
café. Pendant ce temps, il convia Giscard à profiter du jacuzzi et lui raconta
quelques blagues de Toto en lui jouant de l’accordéon pour le détendre.
Le loup rit
beaucoup et faillit en oublier l’objet de sa visite. Heureusement, l’accordéon
commença à lui taper sur les nerfs au bout d’une heure et la faim se fit sentir
de façon plus intense.
Dès qu’ils
passèrent à table, il sortit un énorme sac de sa poche et convia les trois petits
gorets à y pénétrer afin de les ramener chez lui pour les présenter à Anémone
tant il les trouvait sympathiques.
Les petits
gorets ne se le firent pas dire deux fois car une occasion d’aller voir Anémone
ne se refusait pas.
Et c’est
ainsi que le loup ramena les trois petits gorets pour les dévorer
tranquillement chez lui sans coup férir et sans se faire cramer le derrière
dans une marmite d’eau brûlante.